Avez-vous ce qu’il faut pour être entrepreneur ?

“10 traits de personnalité des entrepreneurs à succès, Êtes-vous fait pour être entrepreneur ? Avez-vous le gène de l’entrepreneuriat ?”… Les titres du genre qui font légion sur la toile laissent penser que l’entrepreneur appartient à un type de population bien défini. Les chances d’entreprendre sont elles pour autant réduites à néant si nous ne cochons pas les bonnes cases ? Deux théories ressortent de nos lectures sur le sujet, un petit tour d’horizon s’impose.

Qui est l’entrepreneur “Next door” ?

Un rapide survol de la littérature en la matière permet de dresser un portrait robot plutôt attirant de notre ami l’entrepreneur. Celui-ci, non dénué de charisme, possède une créativité notable doublée de passion et de confiance en lui. Il est curieux, sait se poser les bonnes questions, sa sociabilité et son empathie en font une personne apte à facilement identifier les opportunités et les problèmes à régler. C’est un joueur d’équipe, sa capacité à oser et persister face aux difficultés en fait une personne résiliente qui sait aller chercher les bonnes ressources pour mener son projet à bien. Entreprendre, que ce soit pour devenir auto-entrepreneur ou pour développer une nouvelle entreprise, demande une certaine ténacité et la capacité à faire des sacrifices, on a rarement vu une entreprise ou une startup réussir dès son lancement.

On retrouve l’entrepreneur parmi les 16 personnalités de la théorie des types de personnalités développée par le médecin psychiatre suisse Carl Jung. Un tour sur le site de la fondation Myers Briggs permet de passer un test de personnalité basé sur la même théorie. Alors nos chances d’entreprendre seraient-elles absentes si on ne fait pas partie de ce profil là ? Heureusement non, car le profil entrepreneur semble surtout dépendre de facteurs motivationnels. Que ce soit dans le cadre d’un besoin d’accomplissement personnel, une opportunité de business qui se présente ou un besoin d’indépendance, multiples sont les raisons qui poussent à sortir des sentiers conventionnels pour bâtir une carrière à sa mesure.

En terme de personnalité donc, nous pouvons souffler, rien ne laisse entendre que le monde de l’entrepreneuriat n’est pas accessible à tous, pour peu que l’on se conditionne à une façon de voir le monde et une certaine attitude.  Bien entendu, les personnes plutôt prônes à se trouver des excuses, instables émotionnellement ou les personnalités narcissiques rencontreront probablement plus d’embûches sur leur chemin.

I Need a Dollar…

Bien entendu, venir au monde de parents entrepreneurs prédispose largement à l’entrepreneuriat, l’éducation et la culture conditionnant souvent à suivre le modèle parental. Mais cela dit, le trait le plus communément partagé parmi les entrepreneurs, surprise, c’est l’argent ! Qu’il s’agisse de l’argent de la famille, d’un héritage ou de connexions qui permettent l’accès à une situation financière stable. Une étude de 2015 des économistes Ross Levine et Rona Rubenstein, de l’université de Californie à Berkeley, met en avant la réalité : sans argent de la famille, les chances de devenir entrepreneur baissent de façon significative. Selon la fondation Kauffmann, le coût moyen pour lancer une startup en 2015 était de 30 000$ en moyenne. Par ailleurs, des données du “Global Entrepreneurship Monitor” indiquent que plus de 80% des fonds pour des nouvelles entreprises proviennent d’économies personnelles, de la famille et des amis. En effet, sans salaire au lancement dans la majorité des cas, il faut un moyen de financer les coûts de la vie.

Par ailleurs les hautes études et les grandes écoles donnent un coup de pouce conséquent aux entrepreneurs en herbe : plus l’école est chère ou parmi l’élite, plus le coup de pouce sera grand. Mais là encore, pour accéder à HEC ou un MBA réputé, il faut mettre largement la main au portefeuille. Aussi, naître de parents aisés facilite la prise de risque, d’autant que les entrepreneurs aux familles nanties bénéficient souvent de meilleures connexions.

Mais n’allons pas non plus crier à l’injustice, car aujourd’hui des options existent pour les créateurs d’entreprises qui ne sont pas nés la cuiller en or à la bouche. Qu’il s’agisse des nombreuses pépinieres ou incubateurs qui fleurissent par milliers, d’investisseurs ou de mécènes, les options restent nombreuses pour les entrepreneurs sans le sou, pour peu que l’idée soit bonne, qu’ils sachent correctement rédiger un business plan et argumenter devant des banquiers. Là encore, si ce n’est pas le cas, bon nombre de conseillers parmi les innombrables communautés d’entrepreneurs dans le monde sont là pour aider dans la démarche.

Sortir de “l’eugénisme entrepreneurial”

Une étude de 2013 soulevait la question de l’influence de la génétique dans le développement de profils entrepreneurs. Selon les travaux du professeur d’entrepreneuriat Scott Shane, un certain nombre de gènes hérités pourraient mener à des traits de personnalité propres aux entrepreneurs. Cela dit, les mêmes traits de personnalité se trouvent aussi parmi de très nombreuses personnes qui ne choisissent pas cette voie, aussi rien ne dit que des prédispositions particulières mèneront nécessairement à entreprendre.

D’autre part, un coup d’oeil rapide à l’écosystème entrepreneurial dans le monde laisse émerger un autre constat, plus préoccupant, corroboré par les observations de Ross Levine et Rona Rubenstein : parmi les traits communs principaux des entrepreneurs dans le monde, il ressort que la majorité sont des hommes blancs qui ont reçu une haute éducation. Pourquoi si peu de femmes entreprennent-elles en proportion ? Pourquoi voit-on si peu d’entrepreneurs issus de minorités visibles ? Il existe encore un grand nombre de disparités dans l’accès au monde de l’entrepreneuriat et bien que l’argent soit un facteur majoritaire dans cette inégalité, il n’explique pas pourquoi les femmes notamment sont moins représentées et semblent devoir jouer doublement des coudes pour tirer leur épingle du jeu.

Par Mélanie, pour Ineva