Startups : l’innovation est dans le pré

Startups : l’innovation est dans le pré

Agriculteur solitaire aux bottes crottées qui cherche l’amour ou clan familial qui vit en autarcie depuis des générations : les clichés autour du monde de l’agriculture ont encore parfois la vie dure. Mais dans ce secteur traditionnel si fortement marqué par les savoir-faires ancestraux, les acteurs font face à un double défi : celui de préserver des expertises éprouvées tout en s’adaptant à des problématiques écologiques et des modes de consommation responsables.

Alors qu’il y a encore quelques années les startups dans ce milieu se comptaient sur les doigts d’une main, on en dénombre aujourd’hui près de 130. Pour cette année seulement, le Salon de l’Agriculture abritait 35 exposants sur le parcours thématique “Digital et Innovation”. Prise de conscience citoyenne, réchauffement climatique, consommateurs de plus en plus pointilleux sur la qualité et la provenance de ce qui atterit dans leur assiette, il n’est plus question de maintenir le status quo dans cette industrie en transformation.

L’écosystème startup et innovation dans l’agriculture comporte aujourd’hui de nombreuses ramifications, jusqu’à flirter sans rougir avec secteur de l’énergie, dans le cas des innovations en terme de création de nouveaux carburants issus du recyclage de déchets agricoles. On peut néanmoins identifier un certain nombre de macro tendances qui dessinent l’agriculture de demain.

De la Data dans les Carottes

Rares ou même absents sont les domaines dans lesquels la récolte et le traitement des données n’améliorent pas les processus et résultats. L’agriculture n’échappe évidemment pas à la règle, d’autant que ce secteur fait partie des plus exposés à de multiples variations, notamment climatiques. Dans ce domaine, certaines startups tirent leur épingle du jeu. On souligne par exemple les efforts de My Food et son concept de serres connectées basées sur les techniques de permaculture et d’aquaponie verticale. Karnott pour sa part propose un boitier connecté à placer sur les engins afin de simplifier les interventions agricoles. Weenat par ailleurs offre un service de collecte et de traitement de données à l’aide de capteurs connectés disposés au coeur des parcelles. Une application associée permet à l’exploitant de gérer ses cultures avec précision. Ces trois startups comptent parmi celles qui participent à améliorer le rendement et la gestion du risque à l’aide du traitement de données. Dans ce cadre là, pas de risques pour que nos carottes et nos tracteurs s’inquiètent de ce que Google fera de leurs informations personnelles.

Plus près de toi mon producteur

Il n’est pas donné à tous de pouvoir se déplacer tous les dimanches pour parler météo au marché avec son petit producteur préféré. Dans ce domaine, la réputation de La Ruche qui Dit Oui n’est plus à faire : des produits de saison fournis par des producteurs locaux, livrés directement dans la cuisine. Certes l’humain manque un peu dans l’équation, mais le sentiment de participer à préserver la planète en mangeant local et responsable l’emporte. Difficile de tout faire parfaitement quand on conjugue métro, boulot et afterwork. Monpotager.com pour sa part va même jusqu’a proposer aux clients d’acheter une parcelle d’un producteur local, puis de suivre son évolution en temps réel pour finalement avoir la possibilité de se faire livrer par l’agriculteur en question. Dans la lignée du mouvement Slow Food, qui pour rappel est tiré de l’organisation du même nom créée en 1986, ces startups proposent un accès facilité au “consommer local”.

La tête en l’air, les plants en terre

Il n’est peut être pas si loin, le temps où chacun de nous possédera son propre drone domestique, qui s’envolera sur l’exploitation du coin afin de récolter lui même notre marché de la semaine. En attendant le petit robot aérien permet une amélioration substantielle en terme de précision dans la gestion des productions. Des compagnies comme Airinnov ou Delair proposent des solutions de cartographie des exploitations si précises que le drone permet de détecter des variations de couleurs au sein des plants au centimètre près ou encore leur poids. Une solution écologique et économique, qui permet aux agriculteurs de doser les besoins de leurs cultures pour chaque mètre carré.

Et demain, on va où ?

Des exploitations agricoles connectées au potager urbain partagé, les modes de consommation éco-conscients ont eu raison de certaines techniques de production ou de traitement rendues archaïques. L’agriculteur d’aujourd’hui fait face à la formidable opportunité de pouvoir mettre la technologie au service d’une gestion plus précise, plus agile et plus responsable de son entreprise, souvent à taille humaine. Au delà des collectivités locales, de nombreux tremplins à l’innovation ont vu le jour en France, on citera parmi eux l’initiative “Agriculture 4.0” du Salon de l’Agriculture, qui fait la part belle aux startups qui innovent dans le domaine. Le campus Les Champs du Possible permet quand à lui de connecter professionnels, étudiants, startups et institutions dans un effort de construction de l’agriculture du Futur.

Les idées et les projets fleurissent mais comme pour tous secteurs, seules les solutions développées en réponse à de vraies problématiques de fond perdureront. Parmi ces problématiques, celles de l’utilisation de pesticides qui fait débat depuis les dernières années, malgré les efforts gouvernementaux pour réduire l’utilisation de ces traitements sur les exploitations agricoles, on reste loin du 0% de pesticides dans nos assiettes. Les solutions qui existent aujourd’hui ne sont pas de l’ordre de l’innovation technologique per sé, parlons du Bio par exemple. Très nombreux sont les agriculteurs qui considèrent encore que l’utilisation de pesticides reste la solution la plus économique et efficace aux parasites. On attend donc avec impatience la prochaine startup “agricole” ou l’innovation qui reléguera Bayer-Monsanto aux oubliettes. En attendant parait-il, il est toujours possible de soigner ses plants de courgettes avec de la musique. Profitons-en, aucune étude n’a encore prouvé que Bach était cancérigène.

Par Mélanie pour Ineva